Premier Chapitre
J’observe pensivement l’intérieur de la cabane, éclairé par la lumière du soleil déclinant.J’aime cet endroit pour des tas de raisons : la principale c’est la vue. En effet, de cette cabane juchée au sommet d’un grand chêne, je distingue des vignes plantées de manière linéaire à perte de vue, allant de la vallée jusqu’au flanc des collines au loin. C’est une palette géante composée de diverses nuances de vert et de jaune, séparées, de-ci de-là par de nombreux ruisseaux et chemins. Je rêve d’être la peintre de ce magnifique tableau, et de m’y abandonner. Hélas je ne peux que le contempler sans aucune possibilité d’y accéder.
Un mur, de deux ou trois mètres de haut, tout en pierre, est érigé à une petite trentaine de pas du tronc de l’arbre et délimite la propriété de mes grands-parents. Ce mur m’est infranchissable. Pas parce que je suis incapable de l’escalader, mais parce que mon grand-père m’interdit de sortir de la propriété.
Si je veux passer les immenses grilles qui nous séparent du village de Bourg-Mistral, je dois absolument être accompagnée. Pourquoi cela ? Me demanderez-vous. Parce que bon nombre de personnes souhaitent me nuire. Ou pire : me tuer.
Un mouvement dans les buissons au-dessous de moi, m’arrache à ma contemplation. Quel animal peut faire ce bruit ? Un oiseau ? Un ragondin ? Une belette ? Et si ce qui se trouvait dans le buisson n’était pas un animal ? Mais alors quoi d’autres ?
Je commence à frissonner et me redresse afin de m’enfermer dans la cabane si jamais la chose me veut du mal. Mais j’ai à peine le temps de pousser sur mes jambes qu’une masse noire sort furtivement des broussailles et s’élance vers le tronc pour l’escalader agilement. Le mouvement est si rapide et ma peur si grande que je n’arrive pas à savoir ce qui s’approche de moi. Heureusement, je ne suis pas figée de terreur et j’arrive à saisir une truelle posée sur une petite caisse de bois faisant office de table. Qu’est-ce que cet outil fait là, je n’en ai pas la moindre idée. Mais je m’en fiche, ce qui m’importe c’est que je puisse assommer mon agresseur avant de descendre et de m’enfuir en courant vers la maison.
La masse noire entre soudain dans la cabane et s’arrête comme si quelqu’un avait appuyé sur le bouton pause. C’est alors que je parviens à le reconnaître. C’est Fluck, le chat de mes grands-parents. Les jambes flageolantes, je lâche mon arme improvisée et m’écroule sur le plancher de la cabane.
- Saleté de chat ! Tu m’as flanqué une de ces frousses !!
- Miaou.
Je soupire et passe une main tremblante dans mes longs cheveux blonds emmêlés. À cause de toutes ces histoires, je panique pour un rien. J’ai beau éprouver l’immense désir de sortir de la propriété, si un chat que je connais arrive à me flanquer une terreur pareille, je n’imagine même pas ma réaction face à un animal sauvage. Ou un parfait inconnu.
- Elyana, tu n’es qu’une trouillarde ! me sermonnai-je moi-même.
- Miaou.
Ce miaulement n’est pas le même que tout à l’heure. Cette fois, j’ai l’impression que le chat se moque de moi. Parfois, il m’arrive d’entendre des nuances dans ses cris et de décrypter ses expressions. Il arrive à comprendre ce que les humains ressentent et à communiquer, à sa manière, avec eux. Je ne sais pas comment, mais c’est le cas. De toute façon, ma vie est tellement bizarre que je ne m’étonne pratiquement plus de rien.
C’est ici, dans cette cabane, que mon grand-père et moi venions jouer lorsque j’étais enfant. C’est ici que j’ai appris toutes les belles choses que toutes les petites filles apprennent, comme compter, jouer à la marchande ou encore lire. Mais c’est également ici que j’ai appris la raison de mon enfermement. Je ne suis pas comme tous les autres enfants : je suis une sorcière. La magie fait partie intégrante de ma vie. Au début, je pensais que mon grand-père me faisait une blague, mais il m’a montré qu’il était capable, comme tous les sorciers, de faire des choses incroyables simplement en effleurant la pierre précieuse accrochée au bout de son pendentif. Une Topaze Neptune d’après ses dires. Mais moi, à la différence de mon grand-père, je n’avais pas de pierre, et donc, aucun moyen d’utiliser la magie. Jusqu’à ce que cette Tourmaline face son apparition. Elle est apparue, comme par enchantement, un matin sur ma table de chevet. C’est là que les choses étranges ont commencé. Je m’étais énervée, je ne me rappelle plus pourquoi, et j’avais fait fondre la tête d’une de mes poupées juste en la fixant du regard.
Mon grand-père a alors voulu m’apprendre à maîtriser ces effrayants pouvoirs, mais j’ai toujours refusé de me servir de la Tourmaline. À vrai dire, cette pierre transparente mi verte, mi rose me fait vraiment peur. Parce que c’est à cause d’elle que ma vie s’est transformée en calvaire. À peine quelques jours après son apparition, des hommes bizarres sont arrivés et ont tenté de me kidnapper. Mais heureusement, d’autres individus, des sorciers alliés apparemment, sont venus à ma rescousse et les ont faits fuir. Depuis, rien de tel ne s’est reproduit. Mais lorsque vous êtes une fillette de huit ans et que quelqu’un qui possède des pouvoirs magiques tente de vous kidnapper, ça vous marque à jamais.
Suite à ces événements, mon grand-père a tenté de me persuader de le laisser m’apprendre à me servir de mes pouvoirs, mais j’ai encore refusé. Ma grand-mère m’a toujours soutenue, elle lui disait que lorsque je serais prête, j’apprendrais. Alors il m’a raconté d’où je venais et qui j’étais.
Mon véritable nom est Lénia-Elyana Erabus Ablanthor-Serpentyr Salendar – oui, rien que ça… –, fille des souverains du monde magique parallèle au nôtre, le roi Fabrice Erabus et la reine Rose Ablanthor-Serpentyr Salendar. Ils m’ont envoyée vivre chez mes grands-parents paternels Christian et Médeline car ils pensaient que j’y serais plus en sécurité qu’à Salendar, la capitale du monde des sorciers. Ils ont évidemment bloqué tous les passages entre les deux mondes et contrôlent, depuis, chaque voyage dimensionnel, dans l’espoir qu’il ne m’arrive rien de fâcheux durant mon apprentissage de la magie.
Mais aujourd’hui, j’ai seize ans, et je ne porte jamais la pierre de Tourmaline, au grand dam de mon grand-père, et certainement de mes parents avec qui je n’ai aucun contact.
Personne ne veut comprendre que la magie me fait peur. Elle me gâche la vie plus qu’elle ne l’embellit. Je suis constamment obligée de contrôler mes émotions, je dois faire attention à ce que je dis et à ce que je fais, et comme je suis l’héritière du royaume des sorciers, je n’ai pas le droit de sortir de la propriété Erabus.
Je n’ai pas décidé d’être une sorcière.
Au fond de moi, je rêve d’être une jeune femme normale avec pour seules préoccupations les études, les fringues et les garçons. Mais au lieu de ça, je dois apprendre le fonctionnement d’un royaume que je ne connais pas, l’Histoire de pouvoirs mystérieux que je ne veux même pas maîtriser et les actions politiques que je devrai mener lorsque je serai reine. Sauf que je ne veux pas du trône. Mais ça, évidemment, tout le monde s’en fiche.
Alors, pour fuir toutes ces responsabilités, je viens admirer le coucher du soleil, perchée dans ma cabane d’enfant. Si toute la magie en moi pouvait disparaître subitement. Ça serait tellement bien.
Lorsque le soleil se cache derrière les collines et qu’il ne fait plus assez jour pour distinguer chaque détail du magnifique paysage qui s’étend derrière le mur, je me décide à rentrer, espérant que mon grand-père ne me sermonne pas une nouvelle fois pour que je daigne apprendre la magie.
La propriété est vaste. Aussi, lorsque je rejoins le chemin de gravillon à quelques mètres de l’arbre, accompagnée de Fluck, je sais qu’il me reste encore une bonne dizaine de minutes de marche pour arriver à la maison. Je sors donc mon lecteur mp3.
Comme à mon habitude, je passe les écouteurs derrière mes oreilles et farfouille dans les playlists à la recherche de la chanson par laquelle je vais commencer. C’est à ce moment-là que des pas se font entendre derrière moi. Je me fige. Quelqu’un a pénétré dans la propriété. Un simple voleur ? Un sorcier ? Les pas se rapprochent, d’une allure calme, et s’arrêtent à quelques mètres de moi. Je n’ose pas me retourner de peur de découvrir un assassin masqué brandissant une pierre précieuse devant lui. Mais Fluck, lui, a fait volte-face et feule, le dos arrondi.
- Bonsoir, jeune fille, lance la voix à la fois rauque et mielleuse d’un homme qui, selon moi, ne semble pas beaucoup plus âgé que je ne le suis. Vous devez être Elyana, c’est ça ?
Cette fois, je n’ai plus le choix. L’inconnu s’est adressé à moi et je ne peux pas faire mine de ne pas l’avoir entendu. Alors je pivote lentement et découvre un jeune homme, vingt ans environ, aux longs cheveux noirs, au visage fin et aux yeux étrangement jaunes. Il est vêtu d’un t-shirt blanc sous une veste en cuir et d’un jean noir troué aux genoux. Le look du parfait Bad-boy américain.
Mon cœur rate un battement. Je ne sais pas qui il est, mais je le trouve terriblement attirant. Seulement, quelque chose de mauvais émane de lui. Je cherche alors le détail qui me fera dire s’il est un sorcier ou non, espérant ne pas le trouver. Malheureusement, il est bien là. Au bout d’une chaine d’argent est accrochée une pierre sombre, un mélange de rouge et de noir. Il s’agit d’un Grenat. Et, d’après les cours détaillés de mon grand-père, le Grenat n’est pas une pierre associée aux sorciers doux et aimants. Il existe de nombreuses pierres différentes, plus ou moins rares, classées en deux catégories, les pierres dites positives, représentant les qualités des sorciers, et les pierres dites négatives, représentant leurs défauts. Chaque pierre symbolise la plus grande qualité ou le plus grand défaut du sorcier qui la porte. Et je sais que le Grenat fait partie des pierres négatives associées aux vices. Hélas, je ne me rappelle plus lequel… Il y a trop de pierres et de significations pour que je les retienne toutes.
Cependant, je suis sûre d’une chose : le sorcier qui me fait face n’est pas là pour mon bien.
- Vous êtes ravissante votre Majesté, me complimente l’inconnu tandis que je rougis. Dites-moi, très chère, puis-je vous tutoyer ? Nous avons, à quelques années près, le même âge semble-t-il. Nous n’allons pas nous vouvoyer comme le font les personnes âgées.
- Qui êtes-vous et que voulez-vous ? me suis-je surprise à demander d’une voix dont j’essaie de masquer les tremblements.
Face à moi, le sourire du jeune homme s’efface l’espace d’une brève seconde, mais réapparaît comme si de rien n’était.
- Je me prénomme Athos, répond-il. Et je suis ici pour t’aider Elyana.
Visiblement, il se contrefiche de mon avis concernant le tutoiement. Un sorcier respectueux n’aurait jamais osé tutoyer l’héritière du trône du monde magique sans que celle-ci ne lui en donne la permission. Athos semble s’amuser à me défier. Malgré cela, le tutoiement installe une sorte… d’intimité entre nous. Comme si nous devenions tout d’un coup proches alors que nous ne nous connaissons pas.
- Je n’ai aucunement besoin d’aide, ai-je rétorqué, peu sûre de moi.
A ces mots, il a une réaction que je n’aurais jamais pu prévoir. Il rit.
- Oh si, tu as besoin d’aide Elyana, réplique-t-il une fois son calme retrouvé. J’ai entendu dire que la magie te gâchait la vie et que tu rêvais de ne pas être une sorcière.
Je fronce les sourcils, sur mes gardes. Comment peut-il savoir çà ? Mis à part mes grands-parents, en qui j’ai la plus totale confiance, personne ne sait ce que je ressens. Une voix dans ma tête me dit que c’est parce qu’il est attentionné et compréhensif, mais j’ai un léger doute là-dessus.
- Eh bien, vois-tu, reprend-t-il, je connais un moyen de te libérer de ta magie.
- Lequel ? demandai-je, méfiante.
- Pour le savoir tu vas devoir me suivre.
- Hors de question ! Je sais ce que vous voulez. Fichez-moi la paix.
- Pour une princesse, tu es bien grossière, me fait-il remarquer en avançant vers moi. Je trouve ça super mignon.
Je recule d’un pas. Je ressens un mélange de peur et d’attirance inexpliquée. C’est un sentiment très étrange.
À mes pieds, Fluck feule de plus en plus fort.
- N’approchez pas ! lui ordonnai-je. Et arrêtez de me tutoyer, nous ne sommes pas amis !
- Ce que tu me dis là me vexe, ma chère.
Son visage affiche une fausse mine consternée. Il avance, toujours lentement, et je recule, évaluant les possibilités que j’ai pour me sortir de cette situation.
Je ne peux pas continuer à reculer car je risque à tout moment de butter contre un arbre ou de tomber à cause d’une pierre. Me retourner et m’enfuir m’est également impossible. Déjà parce qu’il est armé de sa pierre magique et pourrait m’abattre avant que je n’aie pu faire dix mètres, mais aussi parce qu’il est plus grand et certainement plus sportif que moi et qu’il me rattraperait sans problème avant que je ne parvienne à la maison. Me jeter sur lui n’est même pas envisageable car, mis à part l’effet de surprise, je ne bénéficierais d’aucun avantage. Et il est, bien évidemment, hors de question que je le suive.
Je suis faite comme un rat.
- Allez, Elyana, viens avec moi. Je vais t’aider, tente-t-il de me convaincre.
Mais je recule toujours, priant pour qu’un miracle se produise. Au lieu de ça, Athos approche sa main droite de son pendentif et s’apprête à le saisir. Il va utiliser la magie, je suis fichue.
C’est alors que Fluck bondit et se retrouve moins d’une seconde plus tard, au niveau du visage d’Athos, toutes griffes dehors.
Le voilà mon miracle. Je ne me fais pas prier et prends mes jambes à mon cou, fonçant dans l’obscurité en direction de la maison. Je n’ai pas parcouru trente mètres que j’entends Fluck miauler d’indignation.
- Espèce de sale chat ! s’écrie Athos avant de s’essuyer le visage de sa manche et de se lancer à ma poursuite. Elyana, reviens !
Mon cœur s’emballe et ma respiration se fait sifflante. Je n’ai pas l’habitude de courir. Mais pour sauver ma vie, je pourrais courir des heures et des heures.
Seulement, l’attaque de Fluck ne m’a pas laissé assez d’avance. Athos est plus grand et plus rapide que moi et il va me rattraper bien avant que j’atteigne le porche éclairé que je distingue au loin.
Quelques secondes plus tard, il me saisit le poignet, me force à m’arrêter et m’attire contre lui. Cette proximité me fait un drôle d’effet, mais ses yeux flamboyants de colère me terrifient bien plus qu’ils ne m’attirent. Sa deuxième main se pose sur son pendentif et s’entoure d’un halo sombre. Il va m’attaquer. C’est fini. Je vais mourir.
Mais avant que son sort ne se déclenche, un jet de lumière jaune jaillit de nulle part et nous frôle. Athos bondit en arrière et m’entraîne avec lui.
- Relâchez l’héritière et vous aurez la vie sauve ! ordonne une voix grave et puissante.
À cause de toute cette agitation, mon cœur tambourine comme un fou dans ma poitrine et je me demande comment il n’a pas encore percé un trou dans ma peau pour fuir ma cage thoracique. J’essaie de distinguer le ou les nouveaux venus, mais je ne discerne rien dans l’obscurité. Soudain, deux silhouettes s’avancent dans la lumière de la lune. Il s’agit de deux hommes vêtus de longues capes bleues foncées parsemées de liserés d’or. L’un, le plus petit, semble avoir un peu plus de quarante ans et possède de courts cheveux bruns coiffés en une houppette. L’autre paraît plus vieux d’au moins dix ans. Peut-être quinze. Ses courts cheveux bruns commencent à griser.
- N’approchez pas ! s’exclame Athos lorsque les deux sorciers entrent totalement dans la faible lueur lunaire. Vous venez de Salendar à en croire vos tenues. Pour tout vous dire, je m’attendais à ce que les souverains envoient leurs chiens galeux pour protéger leur fille.
- Ne nous obligez pas à vous attaquer ! répète le plus jeune des deux hommes de sa voix grave.
Les deux mains de l’homme sont tendues devant lui et un halo de magie jaune les entourent. Cette posture est étrange pour un sorcier. D’après mon grand-père, les mages doivent toucher leur pierre pour lancer leurs sorts.
Athos n’a que faire de la menace du sorcier de Salendar et pouffe une nouvelle fois avant de me tirer violemment devant lui en guise de bouclier.
- Tiens, tiens, l’un des chiens galeux de Leurs Majestés n’est autre que Slayne Faller, le très célèbre conseiller capable de se servir de sa magie sans avoir recours à sa pierre. On dit que votre nomination pour le haut conseil du monde magique est proche. Vous devez faire des jaloux, n’est-ce pas ?
- Lâchez l’héritière ! ordonne le second sorcier.
- Sinon quoi ?! hurle mon agresseur. Vous ne pouvez pas m’attaquer sans risquer de la blesser ! Vous êtes comme qui dirait… coincés ?
Et il ponctue la fin de sa phrase d’un rire dément qui me fait froid dans le dos.
Malgré la peur, mon cerveau tourne à cent à l’heure et j’essaie de trouver une solution, analysant la situation sous tous les angles possibles et imaginables. Malheureusement, Athos a raison : les sorciers envoyés par mes parents sont bloqués.
C’est alors que je perçois un mouvement très discret sur ma droite. Le mouvement est si infime qu’il est quasiment imperceptible. J’essaie de regarder dans cette direction sans bouger la tête, mais mes pupilles me font mal. J’arrive toutefois à discerner la forme féline qui se déplace aussi discrètement que possible. C’est Fluck. Les sorciers de Salendar l’ont-ils remarqué ? Je n’en sais rien. En tout cas, Athos ne l’a pas vu. Il est trop excité pour y prêter attention.
Je sais exactement ce que va faire Fluck. Il va grimper sur mon agresseur et le lacérer de ses griffes. C’est à ce moment précis que je devrai me libérer et me précipiter derrière les deux hommes à la solde de mes parents. Alors je prends une grande inspiration et ferme les yeux, attendant le moment propice. Trois secondes. Deux secondes. Une seconde.
Fluck bondit en feulant bruyamment. Il s’agrippe à la veste en cuir d’Athos et saute à hauteur de son visage. Je profite de la confusion de mon ravisseur pour lui asséner un violent coup de coude dans l’abdomen. Athos me lâche et se plie en deux. Fluck saute sur mon épaule. Je m’élance. Un jet de magie noir fuse dans mon dos, un jaune l’intercepte. Un laser vert perce la nuit, Athos l’esquive d’un bond. Il court se protéger derrière un arbre. Le dénommé Slayne se lance à sa poursuite. L’autre se précipite sur moi et me soutient avant que je ne m’écroule. Je suis terrifiée.
- C’est fini Votre Majesté, me dit-il. Comment vous sentez-vous ?
- Je… je… ça va… merci…, balbutiai-je.
L’homme m’aide à m’asseoir contre un arbre et je prends une grande inspiration, remplissant mes poumons de l’air frais de la nuit. Puis je soupire de soulagement. Il s’en est fallu de peu, mais je suis vivante.
Le second sorcier revient quelques minutes plus tard, seul.
- Le mage de l’Ombre a pris la fuite !
Un frisson me parcourt tout le corps. Il a bien dit « l’Ombre » ? D’après ce que m’a expliqué mon grand-père, l’Ombre est une confrérie – que dis-je ? Une secte ! – de sorciers malintentionnés dont le but est de régner sur le monde. Ils n’hésitent pas à tuer pour obtenir ce qu’ils veulent. Si cet Athos fait vraiment partie de l’Ombre, c’est un vrai miracle que je m’en sois sortie vivante. Est-ce dû à cette… attirance presque irrésistible entre nous ?
- Pourquoi ne vous êtes-vous pas défendue, Votre Majesté !? me sermonne le dénommé Slayne alors qu’il s’approche de moi.
- P-Pardon ? demandai-je en bafouillant.
- Pourquoi ne vous êtes-vous pas servie de votre magie pour vous défendre ?! Pourquoi n’avez-vous pas saisi votre pierre ?!
- Je… euh…
- Sa Majesté porte bien sa pierre sur elle ? m’interroge-t-il.
- Euh… Non…
- Quoi ?! s’exclame-t-il, effaré. Pourquoi diable ne portez-vous pas votre pendentif !?
- Je…
- Nous verrons cela plus tard, Slayne ! nous coupe brusquement le deuxième sorcier. Nous devons nous dépêcher de prévenir Christian et Médeline que leur fils nous a ordonné de ramener Elyana à Salendar ! Elle n’est clairement plus en sécurité ici.